Peut-on se nourrir avec les yeux ? La photographie culinaire prouve qu’un plat préparé est avant tout une œuvre d’art. Comme un tableau de maître que l’on pourrait dévorer après l’avoir admiré. Voici quelques astuces pour illustrer ses petits plats dans les grands.
Crédit photo : http://www.grainedephotographe.com/
Un art relativement inconnu
Il y a des arts qui passent inaperçus. La photographie culinaire en fait partie. À l’heure où la cuisine profite, depuis quelques années, d’un regain d’intérêt généralisé, aux bonnes grâces des émissions télévisées type Top Chef ou Master Chef, la photographie des bons petits plats vient se rappeler à notre existence.
Et elle s’exprime à peu près partout : publicités, emballages, menus des restaurants, livres de recettes ou blogs culinaires amateurs, tous les supports sollicitent ce sous-genre du 8e art qui cherche à capturer le goût à travers l’objectif.
Le but ? Attiser l’appétit du spectateur simplement à l’aide des aliments, des couleurs et d’une bonne lumière. Si vous fréquentez les restaurants, vous avez certainement déjà feuilleté ces menus dont les photographies sont mal fichues, trop sombres, mal cadrées et finalement très peu appétissantes.
L’art de la photo culinaire, c’est précisément l’inverse : faire d’un boeuf de Kobé un tableau de maître et de chaque cuisinier un Delacroix.
Crédit photo : http://www.florioanthony.be/
Du simple cliché alimentaire au food porn
La photographie culinaire a sa petite histoire. Au départ, elle consiste simplement en des prises de vues du haut vers le bas, de manière à capter l’ensemble des aliments bien positionnés dans le plat, couverts écartés. Pas de travestissement, juste de la nourriture brute et entière.
Puis le genre s’est développé en même temps que les besoins publicitaires. Des angles et des échelles de plans sont venus agrémenter les prises de vues. Les opérateurs ont travaillé à rendre la nourriture plus attrayante, en augmentant la hauteur des plats (pensez aux images des hamburgers dans les fast foods), en présentant les aliments en couches afin de privilégier des angles plus étroits, voire de très gros plans.
Enfin, maquillage et effets spéciaux ont achevé de transformer la nourriture en produit à grand spectacle. Les métiers qui constituent la photographie culinaire font en effet penser à une production artistique de grande ampleur : photographe, directeur artistique, styliste culinaire (celui qui peint et met du vernis sur les aliments), accessoiriste.
Peu à peu, l’artifice s’est emparé de la gastronomie. Aujourd’hui, les amateurs tendent à reprendre le pouvoir. Les rédacteurs de blogs culinaires publient désormais leurs recettes et leurs photos sur papier, à l’instar de Chef Nini et de son livre sur la photo culinaire.
Quant aux consommateurs de tous les jours, nombreux sont parmi eux les amateurs de food porn, cette tendance qui pousse à photographier ses plats au restaurant pour les partager sur les réseaux sociaux. De cette tendance dérive également une application comme Tender, qui permet de choisir des recettes en fonction de leur esthétique, sur le modèle de l’appli de rencontre Tinder.
Crédit photo : http://www.guyrenaux.com
Les 6 conseils pour réaliser une belle photographie culinaire
Bref, la prise de vue gustative est à l’honneur. Voici 6 conseils à suivre pour devenir un bon photographie culinaire.
1. Scénarisez ! Pour rendre un plat présentable, il faut le disposer avec élégance et intelligence, mettre en balance les aliments selon leurs couleurs, leur attribuer la meilleure place possible dans l’assiette. Un plat est aussi une histoire que vous racontez : il lui faut des personnages, un récit et un développement.
2. Décorez ! Il s’agit d’harmoniser au maximum les aliments avec la vaisselle dans laquelle vous choisissez de les disposer. Vous pouvez utiliser des plats neutres ou, au contraire, signifiants (avec couleurs et motifs). Inspirez-vous d’autres photographes culinaires !
3. Éclairez ! Privilégiez autant que possible la lumière naturelle, qui rend les couleurs plus appétissantes. Un voilage peut être nécessaire pour atténuer les ombres dures que produit parfois une lumière trop directe.
4. Mettez en scène ! Essayez d’utiliser différentes vaisselles et accessoires, avant même d’y disposer le plat, afin de vous assurer des meilleures prises de vues. Variez les focales, les angles, les orientations de la lumière, les distances, la profondeur de champ. Choisissez un style clair ou obscur, une vue rapprochée ou éloignée, une nature morte ou une présence humaine, des plans nets ou flous.
5. Planifiez ! Contrairement aux plats froids, les plats chauds demandent une préparation plus minutieuse car, en refroidissant, ils deviennent plus mats et moins appétissants. Il faut donc disposer l’appareil en avance, s’assurer de la lumière et du cadrage avant de disposer les aliments dans l’assiette.
6. Dégustez ! Finissez en apothéose votre cheminement artistique en dégustant votre plat, pour que l’image et le goût s’accordent au mieux. Et respectez votre produit en gaspillant le moins possible.
Crédit photo : http://www.nbphotographie.net/
Un métier de plus en plus reconnu
La photographie culinaire a désormais ses stars (voir le site de Franck Hamel, qui en a fait son métier) et ses représentations mondiales : en 2015 a lieu la 6e édition du Festival international de la photographie culinaire, à l’occasion de l’Exposition universelle de Milan et dans plusieurs villes d’Europe et du monde.
En outre, des ateliers professionnels offrent de plus en plus la possibilité de prendre des cours (un exemple avec ce site), pour que l’amateur que vous êtes devienne un grand artiste. Alors, n’hésitez plus à rejoindre les rangs des artistes de la prise de vue gastronomique et apprenez à ouvrir l’appétit des spectateurs par le seul pouvoir de l’image.