Malgré l’absence d’une compétition phare comme une Coupe du Monde de football, les paris sportifs en ligne ont connu en 2015 une dynamique de progression qui ne se dément pas. Les Français sont de plus en plus attirés par les possibilités de miser sur leurs sports préférés, et par la grande facilité des outils de pari en ligne. Mais comment expliquer que les paris aient autant la cote ?
Le pari des jeux en ligne
L’histoire des paris en ligne est toute récente. C’est le 6 avril 2010 que la France vote la libéralisation des paris et des jeux de hasard sur Internet (lire cet article). Cette décision stipule :
- L’ouverture au public des paris sportifs, des paris hippiques et du poker en ligne ;
- L’interdiction renouvelée du casino et des jeux de tirage et de grattage en ligne, qui restent le monopole de la Française des Jeux.
Dans la foulée, 35 opérateurs se positionnent sur le marché, espérant profiter de l’aubaine financière que représente cette décision. Or, si le succès a été au rendez-vous, le marché n’a pas connu l’explosion que ces acteurs impatients attendaient, et une bonne moitié on disparu pour laisser place à des entreprises expertes, mieux préparées, qui aujourd’hui dominent le pari en ligne.
L’association française des jeux en ligne, mise en place à cette occasion, a évoqué en 2014 un « bilan mitigé ». Pourtant, les montants des paris sportifs ont presque triplé en quatre ans, passant de 79 millions d’euros en 2010 à 228 millions en 2014. Cette même année, le montant des mises enregistrées sur les seuls paris sportifs (1,1 milliards) a dépassé celui des paris hippiques (1 milliard).
Depuis, cette dynamique ne s’est pas démentie, au contraire : c’est un succès continu.
Paris sportifs qui rient, paris hippiques qui pleurent
Détaillons le bilan proposé par l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) pour l’année 2015. Les mises enregistrées en paris sportifs atteignent la bagatelle de 1 440 millions d’euros, soit une hausse de 30% par rapport à l’année 2014. Le 4e trimestre fut celui des records : avec un montant de 452 millions d’euros de paris, ce fut la somme la plus élevée depuis l’ouverture du marché en 2010.
Il faut noter que cette croissance est essentiellement portée par deux sports : le football et le tennis, qui à eux deux remportent près de 82% des suffrages. Ils sont suivis par le basket, dont la notoriété tient principalement au goût des parieurs français pour le championnat américain (la NBA).
Ces scores sont surprenants à plusieurs égards. D’abord, parce que les acteurs du pari en ligne comptent en général sur des compétitions majeures comme la Coupe du monde de foot en 2014 pour doper les paris sportifs. Or, si la perspective du Championnat d’Europe qui se tiendra en France en 2016 excite les compteurs, l’année 2015 n’a pas eu droit à un événement de ce genre.
Ensuite, parce que la hausse des paris sportifs en ligne s’accompagne d’une diminution progressive mais inexorable des paris hippiques : bien que les montants dépassent le milliard d’euros en 2015, l’ARJEL souligne une baisse de 2% par rapport à 2014. Un véritable camouflet pour cette institution française qu’est le PMU.
Et ce n’est pas tout : le sacro-saint poker lui-même souffre de la concurrence. En lent déclin depuis 2013, le roi des jeux de cartes n’a jamais réussi à redresser la barre. Certes, 3 729 millions d’euros joués en 2015, ce n’est pas flirter avec l’indigence. Mais c’est tout de même une régression de 14% par rapport à 2014. Et ces bons chiffres reposent surtout sur une hausse des droits d’entrée.
Comment expliquer ce succès ?
L’augmentation des mises enregistrée en 2015 s’explique de plusieurs façons :
- La hausse de la population des joueurs réguliers : on compte, en moyenne, +18% de joueurs par semaine ;
- L’accroissement du nombre total de comptes joueurs actifs de 4% ;
- Un recyclage plus important des mises dû à une augmentation du taux de retour aux joueurs, c’est-à-dire les gains remportés par ceux-ci qui sont plus souvent remisés sur d’autres paris.
Mais ces chiffres n’expliquent pas pourquoi les joueurs sont plus nombreux à parier en ligne, et pourquoi, par conséquent, les paris sportifs connaissent cette embellie. Voici quelques tentatives de réponse :
- Il y a, d’abord, l’appât universel du gain : la possibilité de remporter de belles sommes sans se fatiguer.
- Ensuite, le fait que les paris en ligne permettent de jouer depuis chez soi, ou depuis n’importe quel ordinateur ;
- Le fait qu’avec le développement des terminaux mobiles, il est désormais possible de miser à n’importe quel moment, entre deux courses, au travail, dans les transports, à l’aide d’un simple smartphone ;
- Il y a encore l’intelligence des opérateurs, qui ont parié sur l’intérêt des nouvelles générations de parieurs pour ces terminaux mobiles et ont adapté leurs applications à ces supports ;
- Et il y a, enfin, le fait que les géants des paris sportifs en ligne ne se contentent pas d’encaisser les mises : ils apportent des conseils, présentent les cotes et donnent des informations sur les équipes, les joueurs, les compétitions, à la façon de ce que font les journaux de turf pour les courses hippiques. Ainsi, le joueur ne fait pas que parier de l’argent : il participe pleinement à un mouvement qui englobe tous les acteurs de son sport favori.
Il reste que, pour ce qui est de jouer avec son argent, il est plus grisant de parier sur des compétitions sportives que de miser sur la bourse ou sur le marché des devises. C’est sans doute la première des raisons expliquant ce succès : le besoin viscéral de jouer.