Écrivain, réalisatrice, scénariste et journaliste, Marguerite Duras (1914-1996) est une figure de la vie intellectuelle française de la seconde moitié du XXe siècle. Née il y a cent ans près de Saïgon en Cochinchine, elle est la fille de deux instituteurs qui se portent volontaires pour travailler dans les colonies. C’est d’ailleurs dans le delta du Mékong qu’elle situe l’action de son roman le plus connu, L’Amant, qui raconte la liaison d’une adolescente européenne effrontée avec un Chinois de 17 ans son aîné.
Malade, son père meurt quand elle a sept ans. Elle grandit avec ses deux frères, sa sœur et sa mère. Celle-ci est victime d’une terrible escroquerie lors de l’achat d’un terrain. On lui cache que la parcelle dans laquelle elle investit toutes ses économies est inondable, ce qui cause la ruine de la famille. Contrainte de vivre dans la pauvreté, cette injustice marque profondément Marguerite Duras. C’est une des raisons qui la pousse à écrire.
Associée au Nouveau roman, un mouvement littéraire qui remet en question le roman traditionnel, elle laisse l’image d’un auteur qui a bouleversé les codes de la littérature avec ses phrases déstructurées, mais aussi celle d’une femme engagée.
Une femme de combat
Juste après la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle elle fait partie de la Résistance, elle adhère au Parti communiste français. Elle écrit également plusieurs livres, dont La Douleur, un roman qui raconte le retour de déportation de son premier mari, Robert Antelme.
En 1950, elle publie le roman autobiographique Un barrage contre le Pacifique qui la révèle au grand public. Il raconte l’histoire d’une veuve qui cultive seule avec ses deux enfants une plantation dans le Sud de l’Indochine française, mais dont la concession est régulièrement inondée par la mer qui détruit tout. À la même période, elle divorce, se remarie avec Dionys Mascolo, dont elle a un enfant baptisé Jean. Sa mère est contrainte de revenir en métropole à cause de la Guerre d’Indochine. Elle est également exclue du Parti communiste.
En 1958, elle travaille pour le cinéma. Elle écrit avec Alain Resnais le scénario du film Hiroshima, mon amour. Un film resté célèbre, mais qui ne lui vaut pas que des louanges, puisqu’une autre Marguerite, l’écrivain Marguerite Yourcenar, ironise à son propos : « Pourquoi pas « Auschwitz, mon choux », tant qu’on y est ! «
La même année, elle écrit dans la revue Le 14 juillet contre la prise de pouvoir de Charles de Gaulle. Deux ans plus tard, elle milite contre la Guerre d’Algérie. En 1965, l’adaptation de sa nouvelle Des journées entières dans les arbres remporte un franc succès au théâtre. Elle suit une cure pour régler sa dépendance à l’alcool.
Marguerite Duras, réalisatrice, journaliste et auteur à succès
En Mai-68, elle est du côté de la contestation étudiante. Insatisfaite des adaptations qu’on fait de ses romans, elle se lance dans le cinéma dans les années 70. Comme dans son travail littéraire, elle fait des expériences, en décalant par exemple les images et les paroles. Elle filme notamment Indian song en 1975, Le Camion avec Gérard Depardieu en 1977 et Césarée, un court-métrage, en 1978.
À cette période, elle connaît de nouveaux problèmes avec l’alcool. Au début des années 80, elle entame une collaboration avec le journal Libération, pour lequel elle devient chroniqueuse. Son article sur l’affaire Grégory, où elle se montre convaincue que la mère de l’enfant est coupable du meurtre de ce dernier, déclenche une vive polémique.
En 1984, elle publie le roman L’Amant qui obtient le prix Goncourt. C’est un succès mondial. En 1987, suivent La Vie matérielle et Emily L. L’adaptation cinématographique de L’Amant, réalisé par Jean-Jacques Annaud, sort sur le grand écran en 1992, mais non sans difficultés. En effet, le projet se fait sans Marguerite Duras qui réécrit l’histoire juste avant la sortie du film.
De plus en plus fatiguée, l’écrivain publie plusieurs romans : Yann Andrea Steiner en 1992, Écrire en 1993, et son ultime livre C’est tout en 1995. Elle s’éteint en 1996 à l’âge de 82 ans.